Faire vivre avec, jusqu’au bout ! Prolonger le geste de François Roustang

Par le Dr Eric Bonvin
Médecin psychiatre psychothérapeute FMH. Professeur titulaire à la Faculté de Biologie et de Médecine de l’Université de Lausanne. Directeur général de l’Hôpital du Valais.



Après avoir exploré durant de nombreuses décennies l’expérience de vivre en ce monde avec les êtres vivants, permis à ceux qui en souffrent de la vivre mieux, évité d’échouer sur les écueils mortifères de la modernité, François Roustang a, tout au long de son cheminement, laissé de précieux indices sur l’expérience de vivre. Son parcours l’a conduit dans tous les domaines où elle peut être explorée, comme dans l’institution spirituelle religieuse, la psychologie, la psychanalyse, la philosophie puis l’hypnose thérapeutique.

Trouver âme qui vive dans l’obscurité de la modernité ?

Désigner, maintenir voire revitaliser ce que peut être l’expérience de vivre relié au monde, aux autres et à sa propre existence, n’est pas une démarche allant de soi dans la culture puissamment réifiante de la modernité. Une culture dont l’idéologie se caractérise par un déterminisme commandé, d’une part par les faits, la substance ou les choses en elles-mêmes et, de l’autre, par leurs enchaînements chronologiques (historicité, évolution, algorithmes, programmation). Le pouvoir d’intercession avec ce déterminisme étant attribué à un « clergé » (religieux, scientifique ou d’experts).

Durant cette époque, l’être humain fut longtemps considéré comme détenteur d’un organe spécifique, l’esprit, capable de percevoir des représentations, de les entraîner dans le flux de la pensée et de communiquer par le langage. Un organe modelé par les déterminismes qui caractérisent la modernité et qui a pris différentes formes et appellations, comme la substance pensante (res cogitans) imaginée par Descartes, l’appareil psychique des psychologues et psychanalystes avec ses différents lieux (ça, moi, surmoi) et ses états (conscient, inconscient), ou le cerveau complexe des neuro-sciences.

Le développement des paradigmes de la modernité a finalement conduit à la perte des spécificités dont l’homme, qui les a conçues, s’est affublé. D’abord parce que l’ensemble des mécanismes du vivant qu’il a défini ne sont plus l’exclusivité des êtres vivants puisqu’ils peuvent être, entièrement ou partiellement, le fait d’éléments de synthèse ou de machines fabriquées par les humains. Ensuite, parce qu’il apparaît aujourd’hui que les aptitudes de l’esprit dont l’homme se croyait être le seul bénéficiaire parmi les espèces vivantes (représentations, émotions, langage, organisation sociale, etc.), sont aussi mises en évidence dans les autres espèces vivantes.

En d’autres termes, la modernité a opéré une mise à plat des différences présumées, d’une part entre les êtres vivants et les choses (machines) et, de l’autre, entre l’homme et l’animal. Par ailleurs, ce que vivre peut être pour une personne, en termes d’expérience singulière et indicible, de perceptions subjectives, d’impulsions essentiellement indéchiffrables ou de transformations incertaines, échappe à cette idéologie rationnelle ou se trouve largement occulté par elle.


Edito: Les couleurs de la vie. Sophie Cohen
Ce numéro est sous le signe du vivant, du vital. Tout d’abord grâce à notre artiste : Mario René Madrigal. Ce peintre né au Nicaragua, avant de se révéler au Costa Rica, exprime une continuité entre les temps du précolombien et les temps actuels. Il opère ces liens au travers de la symbolique et les couleurs qu’il utilise. 

Arrêt du tabac: script détaillé d'une séance. Dr Daniel Quin
Je propose quotidiennement des séances de sevrage tabagique en me servant de mon statut assumé de fumeur. J’aime fumer ! Il s’agit dans la structure d’intervention que je souhaite partager avec vous d’une sorte de recette universelle. A vous de l’adapter individuellement à chacun de vos patients et d’en faire « du sur-mesure » comme nous l’ont enseigné Erickson et ses disciples.

Techniques d’hypnoanalgésie. Dr Gilda Pardey Bracho
En neurochirurgie certaines procédures, en particulier de type fonctionnel, méritent des états alternant entre la sédation/analgésie (moments inconfortables et/ou douloureux) et l’état de conscience critique, afin d’évaluer l’efficacité de la procédure chirurgicale : électrode correctement placée, amélioration des symptômes lors de la stimulation corticale ou médullaire, et absence d’effets indésirables lors de la stimulation/résection chirurgicale.

Sclérose en plaques: Diminuer la spasticité. Valérie Etchevers
Depuis quelques années je travaille en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), où je pratique l’hypnose dans ma fonction d’infirmière, et je travaille également en cabinet. Il m’est arrivé assez fréquemment de rencontrer des personnes atteintes de sclérose en plaques. La sclérose en plaques, ou SEP, est une affection du système nerveux central. Elle touche le cerveau, le cervelet et la moelle épinière qui ont en commun d’être constitués de cellules spécifiques, les neurones.

Dossier François Roustang: l'Editorial du Dr Jean-Marc Benhaiem
Les grands penseurs sont fascinants. Leurs textes contiennent des ouvertures et des avancées à n’en plus finir. A chaque lecture et relecture, un nouveau concept apparaît. Ils vont à l’essentiel. Ils sont lus par une multitude qui y trouve son compte. L’écriture est précise. Chaque mot est pesé, choisi. Les textes et ouvrages de François Roustang sont de cette veine. "François a enseigné, a beaucoup écrit, fut beaucoup lu, mais se sentait peu compris", nous rappelle Gaston Brosseau depuis Montréal.

Roustang, l’homme libre. Guillaume Delannoy
C’est une amie qui m’a fait découvrir François Roustang. A une époque de sa vie où elle allait très mal, elle avait acheté La fin de la plainte, un livre destiné à un large public, mais aussi adressé aux professionnels de la relation d’aide, raison qui avait certainement guidé le choix de cette intellectuelle qui cherchait des pistes pour sortir de sa souffrance, mais qui n’aurait jamais, au grand jamais, daigné acheter ou même feuilleter un livre de développement personnel.

« De l’insoutenable légèreté de l’être ». Sylvie Le Pelletier-Beaufond
« De l’insoutenable légèreté de l’être » : c’est en ces mots que François Roustang évoque lors d’un de nos derniers entretiens, à l’aube de ses derniers jours en guise peut-être de clôture de son œuvre, l’essence de la vie qu’il nous invite inlassablement à contacter, dans une forme de présence au monde libre, intense, fluide. François Roustang sans relâche incite, propose, impose même de s’installer dans la vie telle qu’elle est, dans cette « légèreté de l’être, insoutenable parfois ».

Dans les blocs opératoires. Dr Marc Galy
En octobre 1995 François Roustang donne une conférence à la Fondation Ling de Lausanne : « Pourquoi notre culture se méfie-t-elle de l’hypnose ? ». Cette conférence est publiée dans Feuilles oubliées, feuilles retrouvées en mai 2014 par Payot. Dans ce texte, il souligne que « notre époque accueille relativement volontiers l’hypnose lorsqu’elle est capable de produire des effets d’anesthésie ou d’analgésie, c’est-à-dire lorsqu’elle nous coupe des stimuli afférents qui pourraient être cause de douleur… ».

Faire vivre avec, jusqu’au bout ! Prolonger le geste de François Roustang. Dr Eric Bonvin
Après avoir exploré durant de nombreuses décennies l’expérience de vivre en ce monde avec les êtres vivants, permis à ceux qui en souffrent de la vivre mieux, évité d’échouer sur les écueils mortifères de la modernité, François Roustang a, tout au long de son cheminement, laissé de précieux indices sur l’expérience de vivre. Son parcours l’a conduit dans tous les domaines où elle peut être explorée, comme dans l’institution spirituelle religieuse, la psychologie, la psychanalyse, la philosophie puis l’hypnose thérapeutique.

François Roustang : le début d’une aventure. Dr Julien Betbèze
Le début des années 1980 a été marqué par l’arrivée sur la scène thérapeutique de l’importance de l’œuvre de Milton Erickson, avec la publication en 1984 en français du livre de Jay Haley, Un thérapeute hors du commun. L’entrée de l’hypnose thérapeutique en France a été facilitée par les formations mises en place par Jean Godin et Jacques-Antoine Malarewicz. Mais si l’hypnose thérapeutique a pu être accueillie comme une pratique et également comme une pensée, elle le doit au travail théorique effectué par François Roustang depuis la publication de Suggestion au long cours en 1984.

« Jamais contre d’abord ». Dr Stefano Colombo
Je me suis bien préparé pour cette marche à la montagne. Je le sens. J’avance à un rythme régulier. La première partie est une étape d’exploration : un nouveau paysage, des repères à fixer, une évaluation de la difficulté, le choix du bon chemin. Peu à peu, le terrain devient plus irrégulier, la pente commence à se faire sentir. Pendant cette deuxième étape, nous marchons en file indienne à une cadence qui convient à chacun du groupe. Nous avons, au fond, presque le même entraînement.

Le vent dans le dos. Dr Véronique Bonnet
Bonne nouvelle, ça pousse le facteur... « Le vent dans le dos » : l’expression est lancée dans la discussion, elle se pose sur la table. Il amène des lettres du bout du monde. Au fait, de quel bout s’agit-il ? C’est un restaurant « branchouille » où se rassemblent les amis, dans une ambiance qui éveille le regard. Du monde peuplé d’amis, de chaleur et de lumière. Ah, comme c’est bon dans le corps ces lettres... lire ces mots adressés.

La guérison n’a pas d’odeur. Dr Adrian Chaboche
Chers lecteurs, continuons notre exploration. Certains patients nous surprennent, parfois nous tourmentent, et même nous heurtent. Nous nous efforçons alors de parler d’empathie. Selon Carl Rogers : « Etre empathique, c’est percevoir le cadre de référence interne d’autrui aussi précisément que possible et avec les composants émotionnels et les significations qui lui appartiennent comme si l’on était cette personne, mais sans jamais perdre de vue la condition du “comme si” ».

Méditation Vipassana. Dr Dina Roberts
Les liens entre la méditation et l’hypnose suscitent beaucoup de questionnements. Je n’avais aucune pratique méditative lorsque j’ai décidé d’aller en faire l’expérience, en immersion, lors d’une retraite de dix jours pendant laquelle j’ai pratiqué la méditation Vipassana. Cette technique, également décrite comme un « art de vivre », propose d’apprendre à « voir la réalité telle qu’elle est » en passant par une exploration de soi fondée sur l’observation des sensations physiques.

Entretien avec Joyce Mills. Par Gérard Fitoussi
Pouvez-vous nous parler de votre parcours personnel ? Joyce Mills : Enfant, je racontais déjà des histoires. Mon fils aîné fut atteint de paralysie cérébrale, ce qui m’a conduit à m’intéresser à un programme pour les enfants dans sa condition. J’obtins mon doctorat en 1982 et en 1992 nous avons déménagé à Hawaii. Dix jours après notre arrivée, l’île fut touchée par un ouragan, le pire désastre naturel de cette région au XXe siècle. Cet événement a changé ma vie et mon travail.

Le gorille invisible. Quand nos intuitions nous jouent des tours
Notes de lectures par Christine Guilloux. Vous souvenez-vous d’avoir vu passer le gorille ? Ou vous est-il passé sous le nez sans que vous n’y preniez garde ? Vous riez jaune. Votre attention a été détournée, absorbée par une tâche et vous n’avez eu d’yeux que pour la tâche qui vous était assignée. Rappelez-vous, vous assistiez, sur une vidéo, à un jeu de basket entre deux équipes, l’une habillée en tee-shirts blancs, l’autre en tee-shirts noirs, et vous aviez à compter le nombre de passes entre les joueurs de l’équipe des blancs.

La psychothérapie des obsessionnels compulsifs. Claude Michel
Notes de lectures par Gérard Fitoussi. Dans un des ouvrages de références de l’hypnose, « Hypnotic suggestions and metaphors » de D. Corydon Hammond, où sont répertoriées nombre de propositions concernant l’utilisation de l’hypnose dans une variété de troubles, y compris les troubles anxieux, on ne trouve cependant pas de référence à l’utilisation de l’hypnose dans les TOC, pas plus que dans, par exemple, le « Oxford Handbook of Hypnosis ».

L'Hypnose à l’Académie nationale de médecine? Dr Lauriane Bordenave
Entretien avec Jean-Marc Benhaiem. Audition de l’Académie nationale de médecine. Lauriane Bordenave : Bonjour Jean-Marc, tu as été auditionné par l’Académie nationale de médecine (ANM) en janvier de cette année au sujet de l’hypnose. Pour quelles raisons ? Jean-Marc Benhaiem : en mars 2013, l’Académie nationale de médecine publie un rapport et des recommandations sur les médecines complémentaires.

Soyons le messager de notre message. Dr Régis Dumas
Humilité, transmission et partage d’expérience. Petites réflexions à l’intention des futurs congressistes. Le 10 mai 2017 va s’ouvrir en terre volcanique, à Clermont Ferrand, le 10e Forum de la CFHTB : notre terre d’Auvergne et ses volcans montent tranquillement en température... Cette manifestation exceptionnelle, une fois tous les deux ans, va réunir les 35 branches du bel arbre que constitue la Confédération Francophone Hypnose et Thérapies Brèves.

Le mois dernier : Hypnose et anorexie
Hypnose et neurochirurgie
Formation Hypnose et mouvement
Dominique Megglé
L'hypnose, ça marche vraiment ?







Rédigé le Mercredi 30 Aout 2017 modifié le Jeudi 31 Aout 2017
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Vice-Président de France EMDR-IMO ® Président du Collège d'Hypnose et Thérapies Intégratives… En savoir plus sur cet auteur



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