J’avais 23 ans et un sentiment d’échec enflait dans mon cœur depuis des années. Je faisais des études de philosophie. J’avais avoué à un de mes amis mon malaise et il m’avait conseillé de faire une thérapie. Mes lectures m’avaient laissé comprendre que je n’étais pas un bon sujet pour une psychanalyse : je réfléchissais trop et j’avais justement besoin que quelqu’un me stoppe dans mes pérégrinations mentales douloureuses. Il me fallait un dialogue et que l’on m’aide à sortir de ma détresse.
Je me suis tournée vers la Gestalt thérapie d’abord par le hasard d’une rencontre avec une thérapeute ayant fait ses armes dans une école de Gestalt. La première séance fut un électrochoc : elle avait reformulé en quelques phrases la situation que je lui dépeignais et j’avais eu le sentiment qu’elle lisait dans mon crâne.
Je lui ai fait part de mon désir de continuer le travail. Elle me fixa alors un cadre qui me parut normal : il fallait faire trois séances d’essai au terme desquels nous déciderions d’entamer vraiment une thérapie. Pour terminer le travail, trois séances seraient aussi nécessaires.
Chaque séance était fixée toutes les semaines en fonction de nos disponibilités respectives et une session manquée -dont l’annulation ne s’était pas faite dans les 48 heures ouvrées précédent le rendez-vous- était due.
Dans les séances qui suivirent, je réalisai que mon impression d’échec était relative, c’est-à-dire qu’elle correspondait à une certaine représentation que je me faisais de la réussite, définition qui dépendait évidemment de mon éducation. Me voilà donc partie sur le chemin de mon histoire familiale. J’appris au fur et à mesure des entretiens à nommer les émotions qui m’agitaient et de fait à les ressentir pleinement.
J’ai ainsi gravi les étapes du parcours d’un patient que je pense classique : je fis tomber les masques un à un pendant les 8 années que durèrent ma thérapie. Je passai alors du statut de jeune fille pas très douée dans une famille de génies à celle de femme intelligente dans une famille dysfonctionnelle.
Ce chemin que je résume en une phrase fut évidemment plus complexe. Ma relation avec la thérapeute se fit de plus en plus forte. J’appris à la tutoyer, à l’embrasser pour la saluer, en un mot à m’attacher à elle. Cette relation qui me faisait d’abord peur-elle était pour moi la marque d’une dépendance dangereuse- fut encouragée par ma thérapeute qui m’expliqua que le succès de la thérapie reposait aussi sur mon acceptation de ce lien et de cette dépendance passagère. Elle m’expliqua que la dépendance était aussi une manière de grandir et de se laisser guider. J’acceptai d’autant plus facilement cette vision que je perdis ma mère lors de ma quatrième année de thérapie. J’étais alors en proie à une fragilité extrême que l’empathie et les marques d’affection de ma thérapeute rééquilibraient un peu.
Parallèlement à mes séances individuelles hebdomadaires, ma psy me poussa rapidement après une année à intégrer un groupe de thérapie qu’elle co-animait une fois par mois avec un collègue masculin. Mon rapport aux hommes pourrait y être travaillé grâce à la présence d’un thérapeute ainsi que mon rapport aux autres en général. Je trouvai l’idée intéressante et je me laissai convaincre d’y participer.
Malgré mon statut d’étudiante et le peu de ressources dont je disposais, j’acceptai rapidement de dépenser 270 euros par mois pour ma thérapie. Je ne fis donc presque plus que cela à côté de mes études. Cela était devenu vital, une sorte d’investissement immobilier sur ma personne. Je ne voyais de toute façon pas d’autres manières de me sortir de mon mal être : à force de manquer de confiance en moi, j’épuisais mes sœurs, mes amis et je ne voulais pas sacrifier mon entourage.
Les séances de groupe me firent un grand effet très vite : les participants y livraient leur joie, leur peine et je me retrouvais dans beaucoup de leur récit. J’assistais aux travaux et j’avais le sentiment d’accélérer mon parcours en profitant de l’expérience des autres et des commentaires des thérapeutes.
Je me suis tournée vers la Gestalt thérapie d’abord par le hasard d’une rencontre avec une thérapeute ayant fait ses armes dans une école de Gestalt. La première séance fut un électrochoc : elle avait reformulé en quelques phrases la situation que je lui dépeignais et j’avais eu le sentiment qu’elle lisait dans mon crâne.
Je lui ai fait part de mon désir de continuer le travail. Elle me fixa alors un cadre qui me parut normal : il fallait faire trois séances d’essai au terme desquels nous déciderions d’entamer vraiment une thérapie. Pour terminer le travail, trois séances seraient aussi nécessaires.
Chaque séance était fixée toutes les semaines en fonction de nos disponibilités respectives et une session manquée -dont l’annulation ne s’était pas faite dans les 48 heures ouvrées précédent le rendez-vous- était due.
Dans les séances qui suivirent, je réalisai que mon impression d’échec était relative, c’est-à-dire qu’elle correspondait à une certaine représentation que je me faisais de la réussite, définition qui dépendait évidemment de mon éducation. Me voilà donc partie sur le chemin de mon histoire familiale. J’appris au fur et à mesure des entretiens à nommer les émotions qui m’agitaient et de fait à les ressentir pleinement.
J’ai ainsi gravi les étapes du parcours d’un patient que je pense classique : je fis tomber les masques un à un pendant les 8 années que durèrent ma thérapie. Je passai alors du statut de jeune fille pas très douée dans une famille de génies à celle de femme intelligente dans une famille dysfonctionnelle.
Ce chemin que je résume en une phrase fut évidemment plus complexe. Ma relation avec la thérapeute se fit de plus en plus forte. J’appris à la tutoyer, à l’embrasser pour la saluer, en un mot à m’attacher à elle. Cette relation qui me faisait d’abord peur-elle était pour moi la marque d’une dépendance dangereuse- fut encouragée par ma thérapeute qui m’expliqua que le succès de la thérapie reposait aussi sur mon acceptation de ce lien et de cette dépendance passagère. Elle m’expliqua que la dépendance était aussi une manière de grandir et de se laisser guider. J’acceptai d’autant plus facilement cette vision que je perdis ma mère lors de ma quatrième année de thérapie. J’étais alors en proie à une fragilité extrême que l’empathie et les marques d’affection de ma thérapeute rééquilibraient un peu.
Parallèlement à mes séances individuelles hebdomadaires, ma psy me poussa rapidement après une année à intégrer un groupe de thérapie qu’elle co-animait une fois par mois avec un collègue masculin. Mon rapport aux hommes pourrait y être travaillé grâce à la présence d’un thérapeute ainsi que mon rapport aux autres en général. Je trouvai l’idée intéressante et je me laissai convaincre d’y participer.
Malgré mon statut d’étudiante et le peu de ressources dont je disposais, j’acceptai rapidement de dépenser 270 euros par mois pour ma thérapie. Je ne fis donc presque plus que cela à côté de mes études. Cela était devenu vital, une sorte d’investissement immobilier sur ma personne. Je ne voyais de toute façon pas d’autres manières de me sortir de mon mal être : à force de manquer de confiance en moi, j’épuisais mes sœurs, mes amis et je ne voulais pas sacrifier mon entourage.
Les séances de groupe me firent un grand effet très vite : les participants y livraient leur joie, leur peine et je me retrouvais dans beaucoup de leur récit. J’assistais aux travaux et j’avais le sentiment d’accélérer mon parcours en profitant de l’expérience des autres et des commentaires des thérapeutes.
Cependant, le co-animateur du groupe, que je ne connaissais pas, ne me faisait pas bon effet. Je le trouvais peu perspicace et même parfois un peu lourd dans ses remarques.
Nous partagions ce sentiment avec les autres membres du groupe que je croisais parfois en dehors des séances autour d’un café. J’en ai fait part à ma thérapeute qui m’assura que mon ressenti était une projection de mon rapport à mon père et m’encouragea à travailler avec le thérapeute sur le sujet lors du prochain regroupement.
Lors de celui-ci, le thérapeute considéra également ma remarque comme une projection et me fit comprendre que j’avais beaucoup de mal à accepter que l’autre ne fut pas parfait, qu’il pouvait faire des erreurs ou tout simplement ne pas correspondre à l’image que je voulais avoir de lui. Mais bientôt les événements s’accélérèrent : les travaux avec d’autres participants dérapèrent parfois en un rapport de force avec le thérapeute qui ne lâchait rien et trouvait un certain plaisir à assujettir le patient en lui faisant comprendre qu’il était seul responsable de cet éclat de voix. Ma psy intervenait à chaque fois pour calmer la situation. Puis, un jour, est arrivée dans le groupe une patiente du thérapeute, Marie. Elle voulait intégrer le groupe car elle souffrait, disait-elle, de solitude.
Au fur et à mesure des séances, les interventions de Marie me mettaient mal à l’aise. Elle distillait beaucoup de propos négatifs lors des feedback: « je suis très jalouse de ta réussite untel, je ne comprends pas pourquoi je ne suis pas heureuse (en pleurs) » ou encore « j’ai envoyé un sms pour boire un verre avec untel (du groupe) la dernière fois et elle n a pas pu, j’en ai été mortifiée », ou enfin « J’ai passé le week-end seule à me morfondre, car les gens sont égoïstes, ils ont tous des choses à faire et ne pensent pas à moi ». Puis elle s’en est prise à moi me disant qu’elle trouvait que « je prenais trop de place ».
Et là, mes alertes rouges se sont mises à clignoter. C’était l’année de la mort de ma mère, j’étais en dépression, et je sentais quand même que j’avais à faire à une personnalité perverse. Les autres membres du groupe ont réagi au fil des séances en ne partageant plus rien, en ne participant plus aux travaux et la dynamique s’éteignit petit à petit. Je fis plusieurs fois la remarque à ma thérapeute en séance individuelle qui me rétorqua à chaque fois que j’étais en train de reproduire avec cette jeune femme ma situation conflictuelle avec une de mes sœurs.
Je lui fis ensuite remarquer qu’il ne se passait plus rien dans le groupe, ce qu’elle interpréta comme une manière que j’avais d’attendre de la vie toujours qu’il s’y passe beaucoup de choses, que j’avais du mal à me contenter d’être là sans que ce soit « Champagne » tous les jours. Elle me dit même que cette patiente était trop stigmatisée dans le groupe. Mais je tins bon et finit par déclarer mon départ du groupe en séance. Ma thérapeute me demanda d’en faire part lors du prochain regroupement, ce que je fis. Mais au moment où je l’annonçai, elle me pria de bien vouloir spécifier les raisons de mon départ. Je dis alors à Marie que je me sentais très mal à l’aise avec ses interventions et ma gêne m’empêchait de continuer à participer à ces réunions. A ce moment-là, Marie m’insulta et se leva comme pour me frapper. Ma thérapeute bondit de son siège en s’interposant physiquement entre nous. J’étais tétanisée. Marie déclara alors que nous étions des gens atroces, qu’elle était obligée de se laver en rentrant chez elle après les groupes tellement l’odeur de chacun l’importunait etc. etc. Elle quitta le groupe avec perte et fracas, le tout devant son thérapeute, assis dans son siège, immobile, montrant son émotion pour sa patiente « en qui il avait tellement cru ». Son départ délia un peu les langues et les autres membres du groupe témoignèrent de leur peur de cette jeune femme, de la difficulté qu’ils avaient à parler en sa présence, des messages culpabilisant qu’elle leur envoyait …
On me pria de rester dans le groupe, le danger parti, et ma thérapeute me dit que mon état de deuil avancé risquait de m’isoler : ce n’était pas le moment de quitter le groupe.
Nous partagions ce sentiment avec les autres membres du groupe que je croisais parfois en dehors des séances autour d’un café. J’en ai fait part à ma thérapeute qui m’assura que mon ressenti était une projection de mon rapport à mon père et m’encouragea à travailler avec le thérapeute sur le sujet lors du prochain regroupement.
Lors de celui-ci, le thérapeute considéra également ma remarque comme une projection et me fit comprendre que j’avais beaucoup de mal à accepter que l’autre ne fut pas parfait, qu’il pouvait faire des erreurs ou tout simplement ne pas correspondre à l’image que je voulais avoir de lui. Mais bientôt les événements s’accélérèrent : les travaux avec d’autres participants dérapèrent parfois en un rapport de force avec le thérapeute qui ne lâchait rien et trouvait un certain plaisir à assujettir le patient en lui faisant comprendre qu’il était seul responsable de cet éclat de voix. Ma psy intervenait à chaque fois pour calmer la situation. Puis, un jour, est arrivée dans le groupe une patiente du thérapeute, Marie. Elle voulait intégrer le groupe car elle souffrait, disait-elle, de solitude.
Au fur et à mesure des séances, les interventions de Marie me mettaient mal à l’aise. Elle distillait beaucoup de propos négatifs lors des feedback: « je suis très jalouse de ta réussite untel, je ne comprends pas pourquoi je ne suis pas heureuse (en pleurs) » ou encore « j’ai envoyé un sms pour boire un verre avec untel (du groupe) la dernière fois et elle n a pas pu, j’en ai été mortifiée », ou enfin « J’ai passé le week-end seule à me morfondre, car les gens sont égoïstes, ils ont tous des choses à faire et ne pensent pas à moi ». Puis elle s’en est prise à moi me disant qu’elle trouvait que « je prenais trop de place ».
Et là, mes alertes rouges se sont mises à clignoter. C’était l’année de la mort de ma mère, j’étais en dépression, et je sentais quand même que j’avais à faire à une personnalité perverse. Les autres membres du groupe ont réagi au fil des séances en ne partageant plus rien, en ne participant plus aux travaux et la dynamique s’éteignit petit à petit. Je fis plusieurs fois la remarque à ma thérapeute en séance individuelle qui me rétorqua à chaque fois que j’étais en train de reproduire avec cette jeune femme ma situation conflictuelle avec une de mes sœurs.
Je lui fis ensuite remarquer qu’il ne se passait plus rien dans le groupe, ce qu’elle interpréta comme une manière que j’avais d’attendre de la vie toujours qu’il s’y passe beaucoup de choses, que j’avais du mal à me contenter d’être là sans que ce soit « Champagne » tous les jours. Elle me dit même que cette patiente était trop stigmatisée dans le groupe. Mais je tins bon et finit par déclarer mon départ du groupe en séance. Ma thérapeute me demanda d’en faire part lors du prochain regroupement, ce que je fis. Mais au moment où je l’annonçai, elle me pria de bien vouloir spécifier les raisons de mon départ. Je dis alors à Marie que je me sentais très mal à l’aise avec ses interventions et ma gêne m’empêchait de continuer à participer à ces réunions. A ce moment-là, Marie m’insulta et se leva comme pour me frapper. Ma thérapeute bondit de son siège en s’interposant physiquement entre nous. J’étais tétanisée. Marie déclara alors que nous étions des gens atroces, qu’elle était obligée de se laver en rentrant chez elle après les groupes tellement l’odeur de chacun l’importunait etc. etc. Elle quitta le groupe avec perte et fracas, le tout devant son thérapeute, assis dans son siège, immobile, montrant son émotion pour sa patiente « en qui il avait tellement cru ». Son départ délia un peu les langues et les autres membres du groupe témoignèrent de leur peur de cette jeune femme, de la difficulté qu’ils avaient à parler en sa présence, des messages culpabilisant qu’elle leur envoyait …
On me pria de rester dans le groupe, le danger parti, et ma thérapeute me dit que mon état de deuil avancé risquait de m’isoler : ce n’était pas le moment de quitter le groupe.
Je restai. Mais j’étais de plus en plus en colère contre ce thérapeute qui, du haut de son mètre quatre-vingt, n’était pas intervenu lors de l’éclat de sa patiente. J’étais aussi en colère qu’une femme perverse, en thérapie individuelle depuis apparemment 4 ans, puisse intégrer un tel groupe. Et surtout j’étais stupéfaite de l’omerta qui suivit son départ. Plus personne n’en parla.
Nous ne travaillâmes pas sur les réactions de chacun face à la présence de Marie qui resta presqu’un an dans le groupe (10 séances). Je fis part de ma colère au thérapeute qui me dit que les événements étaient trop « frais » pour lui et qu’il reviendrait vers moi: ce qu’il ne fit pas. A mon grand étonnement aussi, j’étais la seule à m’insurger d’avoir payé 10 séances de thérapie où la présence d’une femme toxique avait perturbé le fonctionnement du groupe. Les autres étaient juste soulagés de son départ. Je fus la seule aussi à m’étonner que cet événement ne donna pas lieu à un travail spécifique avec le groupe : après tout, la perversité était apparemment une donnée avec lesquelles nous avions dû à l’évidence composer dans nos histoires et nos réactions à l’égard Marie témoignaient de la façon dont nous réagissions tous, en général, face à ce genre de personnalité. Mais non. Rien. Ma thérapeute me félicita de mon courage en séance individuelle et me fit remarquer à quel point mon regard s’était aiguisé. Je lui fis part encore une fois de ma stupéfaction face à son co-animateur.
Mais, j’eus droit à la sacro sainte réponse : « vois-tu comme il t’est difficile de tolérer la faiblesse d’un homme. Il est difficile pour toi de voir un homme s’effondrer, et ton père ….».
Je cheminais parallèlement dans ma vie et finit par résoudre une grosse part des choses qui m’avaient amené dans le cabinet de cette psy. Mon estime de moi augmentait petit à petit et j’étais plus sûre de moi. Il m’était donc évident que mon travail allait dans le bon sens, vu l’évolution positive de ma situation. J’avais aussi pu mesurer, l’importance des conseils de ma psy avant le décès de ma mère : j’avais beaucoup parlé avec cette dernière les semaines avant sa mort, je lui avais exprimé mon besoin d’apaisement avant son départ et surtout je lui avais demandée sur son lit d’hôpital de me bénir pour que je puisse continuer ma vie avec son regard bienveillant. Je pus mesurer les effets bénéfiques de ces paroles dans la suite de mon deuil.
Je continuais la thérapie car j’avais encore du mal à gagner ma vie suffisamment et cela restait un point sur lequel je voulais avancer.
Cependant des choses me gênaient que je n’osais pas vraiment voir. A chaque fois que je faisais part à ma thérapeute de mes problèmes d’argent pour prendre part à un stage auquel elle m’encourageait à participer (400 euros les 3 jours), elle s’insurgeait. Elle considérait que l’argent ne devait pas m’arrêter, que c’était une mauvaise raison, que je pouvais payer en plusieurs fois… De ce fait je n’osais jamais dire « non » catégoriquement et fis toujours les efforts financiers pour y être à chaque fois. De la même manière, les règles du groupe (qui n’étaient que rarement formulées aux participants) stipulaient que nous devions payer chaque séance programmée un an à l’avance même si nous avions un empêchement. Il m’est arrivé en 7 ans de rater deux séances consécutivement que je payai rubis sur l’ongle car je devais partir travailler en province. Quelle ne fut pas ma surprise quand ma thérapeute me fit remarquer que ces absences disaient quelque chose de la baisse de mon engagement dans le groupe! J’osais lui dire qu’elle ne pensait pas m’empêcher de gagner ma vie pour assister à une séance que je payais quand même ! Je me suis alors entendue dire que non, les choses ne se passaient pas comme ça dans l’inconscient et que si ma présence était importante pour moi alors les choses se seraient goupillées autrement.
J’avais déjà entendu ce type de discours en groupe, mais là je sentais au fond de moi que le malaise montait.
L’apogée se produisit trois mois plus tard lors d’une séance de groupe où le thérapeute démontra encore une fois son incompétence pour ne pas dire sa toxicité.
Nous ne travaillâmes pas sur les réactions de chacun face à la présence de Marie qui resta presqu’un an dans le groupe (10 séances). Je fis part de ma colère au thérapeute qui me dit que les événements étaient trop « frais » pour lui et qu’il reviendrait vers moi: ce qu’il ne fit pas. A mon grand étonnement aussi, j’étais la seule à m’insurger d’avoir payé 10 séances de thérapie où la présence d’une femme toxique avait perturbé le fonctionnement du groupe. Les autres étaient juste soulagés de son départ. Je fus la seule aussi à m’étonner que cet événement ne donna pas lieu à un travail spécifique avec le groupe : après tout, la perversité était apparemment une donnée avec lesquelles nous avions dû à l’évidence composer dans nos histoires et nos réactions à l’égard Marie témoignaient de la façon dont nous réagissions tous, en général, face à ce genre de personnalité. Mais non. Rien. Ma thérapeute me félicita de mon courage en séance individuelle et me fit remarquer à quel point mon regard s’était aiguisé. Je lui fis part encore une fois de ma stupéfaction face à son co-animateur.
Mais, j’eus droit à la sacro sainte réponse : « vois-tu comme il t’est difficile de tolérer la faiblesse d’un homme. Il est difficile pour toi de voir un homme s’effondrer, et ton père ….».
Je cheminais parallèlement dans ma vie et finit par résoudre une grosse part des choses qui m’avaient amené dans le cabinet de cette psy. Mon estime de moi augmentait petit à petit et j’étais plus sûre de moi. Il m’était donc évident que mon travail allait dans le bon sens, vu l’évolution positive de ma situation. J’avais aussi pu mesurer, l’importance des conseils de ma psy avant le décès de ma mère : j’avais beaucoup parlé avec cette dernière les semaines avant sa mort, je lui avais exprimé mon besoin d’apaisement avant son départ et surtout je lui avais demandée sur son lit d’hôpital de me bénir pour que je puisse continuer ma vie avec son regard bienveillant. Je pus mesurer les effets bénéfiques de ces paroles dans la suite de mon deuil.
Je continuais la thérapie car j’avais encore du mal à gagner ma vie suffisamment et cela restait un point sur lequel je voulais avancer.
Cependant des choses me gênaient que je n’osais pas vraiment voir. A chaque fois que je faisais part à ma thérapeute de mes problèmes d’argent pour prendre part à un stage auquel elle m’encourageait à participer (400 euros les 3 jours), elle s’insurgeait. Elle considérait que l’argent ne devait pas m’arrêter, que c’était une mauvaise raison, que je pouvais payer en plusieurs fois… De ce fait je n’osais jamais dire « non » catégoriquement et fis toujours les efforts financiers pour y être à chaque fois. De la même manière, les règles du groupe (qui n’étaient que rarement formulées aux participants) stipulaient que nous devions payer chaque séance programmée un an à l’avance même si nous avions un empêchement. Il m’est arrivé en 7 ans de rater deux séances consécutivement que je payai rubis sur l’ongle car je devais partir travailler en province. Quelle ne fut pas ma surprise quand ma thérapeute me fit remarquer que ces absences disaient quelque chose de la baisse de mon engagement dans le groupe! J’osais lui dire qu’elle ne pensait pas m’empêcher de gagner ma vie pour assister à une séance que je payais quand même ! Je me suis alors entendue dire que non, les choses ne se passaient pas comme ça dans l’inconscient et que si ma présence était importante pour moi alors les choses se seraient goupillées autrement.
J’avais déjà entendu ce type de discours en groupe, mais là je sentais au fond de moi que le malaise montait.
L’apogée se produisit trois mois plus tard lors d’une séance de groupe où le thérapeute démontra encore une fois son incompétence pour ne pas dire sa toxicité.
J’avais fini par lui reparler de ma colère au sujet de la présence de Marie et lui dit qu’il n’était jamais revenu vers moi depuis les événements (soit 20 séances). Il avoua ne pas s’être souvenu qu’il me devait des explications-mais les membres du groupe en attestèrent – et me fit des excuses. Il avoua qu’il ne s’était pas rendu compte qu’elle était perverse et qu’il avait avec moi des rapports complexes depuis mon arrivée dans le groupe (soit, il y a 7 ans) car il n’arrivait pas à « m’apprivoiser ».
Je fus choquée de ce terme qui me transformait en bête féroce mais je me résolus à ne rien dire, comprenant que j’allais encore avoir droit à mon « intolérance à l’erreur chez la gente masculine »… Puis, dans la même séance, un de ses patients, Georges, lui exprima sa colère. Il nous raconta que depuis quinze jours, le thérapeute refusait de le voir à son horaire habituel de rendez-vous lui rétorquant par deux fois que la séance était un autre jour. Pourtant, Georges voyait depuis 2 ans, son thérapeute le même jour à la même heure. Le thérapeute se mit en colère lui expliquant qu’il n’avait pas à se voir imposer les rendez-vous par ses patients et qu’il était choqué de voir que Georges n’envisageait même pas d’avoir pu faire une erreur, lui !
Puis sa colère monta encore quand le patient lui dit qu’il ne voyait pas comment il aurait pu changer son horaire coutumier sans qu’ils en aient parlé. Et le thérapeute n’en pouvant plus, lui fit deux bras d’honneur, voulant interpréter ainsi« la violence supposée» de la réponse que lui faisait Georges.
Je fus choquée de cela. Les règles de respect et de passage à l’acte étaient maintenant largement franchies et ma thérapeute tentait encore de calmer les esprits en demandant à Georges ce que lui rappelait cette scène avec le thérapeute. Et là, j’assistai à une confession où Georges avoua que son père manquait souvent leur rendez-vous… Je pris alors conscience de ce qui était à mes yeux une manipulation : le thérapeute dépassait les bornes et on renvoyait le patient à une possible projection, déresponsabilisant ainsi l’acteur principal ! Je voulus partir sur le champ mais la peur d’être taxée de « passage à l’acte » me fit garder ma place en silence- je pris alors, en moi, la décision de quitter définitivement le groupe. Les autres membres, témoins de l’esclandre, reconnurent que le thérapeute était allé loin mais nous avions l’habitude de ce genre de brouille (le thérapeute ne sachant comment synchroniser ses agendas électroniques, la scène était malheureusement connue de tous, sauf de son auteur).
J’annonçai ma décision à ma psy en séance individuelle. Elle me demanda de revenir au prochain groupe pour dire mon sentiment et déclara que je ne pouvais pas quitter le groupe sans faire les 3 regroupements prévus par ses règles et dire au revoir au groupe… ce fut trop ! Il me fallut quatre séances individuelles pour lui faire entendre que je n’allais pas participer à un énième abus de pouvoir de la part de ce thérapeute et qu’à partir du moment où les bornes étaient franchies je n’étais plus tenue à aucun code de loi. Face à sa résistance et aux sempiternelles remontrances « tu as vu comment tu es intolérante à l’erreur » je pris la décision d’arrêter aussi ma thérapie individuelle.
Elle accueillit mon annonce avec stupeur me demandant pourquoi je n’acceptais pas de traverser ces épreuves avec elle et que je partais à la première difficulté ! Je lui expliquai alors que je ne décolérais pas d’avoir participé à ces abus de pouvoir de la part du thérapeute, et qu’elle y avait d’ailleurs joué le rôle de complice. Elle fut choquée et me demanda de m’expliquer. Je lui fis comprendre alors qu’elle m’avait prescrit ces séances de groupe et qu’elle n’avait eu de cesse de me renvoyer à moi quand son partenaire dépassait les bornes, me faisant croire qu’il s’agissait de moi, de mon intolérance etc.
Étant quelqu’un de facilement « coupable » je me remettais évidemment à chaque fois en question. J’ajoutai qu’en restant silencieuse face aux débordements de son partenaire elle cautionnait son comportement, et que je ne supportais plus cela. Elle essaya encore de me dire que ce n’était qu’une erreur de son camarade (qui est aussi un de ses amis) et que d’ailleurs Georges et lui avaient retrouvé une entente cordiale ! C’en était trop : parce que l’abusé faisait la paix avec son abuseur, alors tout devait bien se passer ?
A ces mots, ma thérapeute s’effondra en larmes, et j’assistai à quinze minutes de sanglots où elle me demanda pardon. Elle me dit que nous devions faire encore trois séances pour terminer le travail. Mais j’étais sonnée. Je ne comprenais pas ce qui se passait. Ou si, je comprenais que je n’avais plus rien à faire ici et qu’il me fallait partir. Elle me fixa un rendez-vous la semaine suivante que j’annulai par mail le samedi pour le mardi en lui disant combien notre dernière entrevue avait été éprouvante pour moi. Elle me répondit que comme la règle des 48 heures ouvrées n’était pas respectée je lui devais la séance de mardi !!!
Je ne répondis plus et ne paya pas cette ultime séance.
Ainsi, se termina un chemin de huit ans et demie de thérapie : par les sanglots de ma thérapeute et la demande d’un règlement.
Si beaucoup autour de moi ont salué mon sursaut et la légitimité de mon indignation, cette expérience m’a fait beaucoup réfléchir sur mon chemin.
Il serait tout à fait faux de dévaloriser ces années passées dans un cabinet de gestalt thérapeute- j’entends déjà certains rire de la piscine en or que j’ai payé à ma psy !
J’y ai principalement appris à définir ce qui dépendait de moi et ce qui n’en dépendait pas. J’ai aussi appris à exprimer mon ressenti sur les situations que je vis et apparemment, à dénoncer les abus. Ceci reste un apprentissage important. Mais j’y ai aussi expérimenté que la liberté de pensée est une chose précieuse et….aliénable au moins pour un temps.
Je ne sais pas ce qu’est un bon thérapeute, je ne sais pas ce qu’est une bonne thérapie : ce que je sais c’est qu’une enfance malheureuse se paye de la répétition de nombreux abus à l’âge adulte, quels que soient les efforts que l’on fait pour s’en sortir. Alors, la meilleure chose que je retiens de tout cela est de protéger l’enfant qui est en nous et à côté de nous, car, sinon, la route est longue.
Je fus choquée de ce terme qui me transformait en bête féroce mais je me résolus à ne rien dire, comprenant que j’allais encore avoir droit à mon « intolérance à l’erreur chez la gente masculine »… Puis, dans la même séance, un de ses patients, Georges, lui exprima sa colère. Il nous raconta que depuis quinze jours, le thérapeute refusait de le voir à son horaire habituel de rendez-vous lui rétorquant par deux fois que la séance était un autre jour. Pourtant, Georges voyait depuis 2 ans, son thérapeute le même jour à la même heure. Le thérapeute se mit en colère lui expliquant qu’il n’avait pas à se voir imposer les rendez-vous par ses patients et qu’il était choqué de voir que Georges n’envisageait même pas d’avoir pu faire une erreur, lui !
Puis sa colère monta encore quand le patient lui dit qu’il ne voyait pas comment il aurait pu changer son horaire coutumier sans qu’ils en aient parlé. Et le thérapeute n’en pouvant plus, lui fit deux bras d’honneur, voulant interpréter ainsi« la violence supposée» de la réponse que lui faisait Georges.
Je fus choquée de cela. Les règles de respect et de passage à l’acte étaient maintenant largement franchies et ma thérapeute tentait encore de calmer les esprits en demandant à Georges ce que lui rappelait cette scène avec le thérapeute. Et là, j’assistai à une confession où Georges avoua que son père manquait souvent leur rendez-vous… Je pris alors conscience de ce qui était à mes yeux une manipulation : le thérapeute dépassait les bornes et on renvoyait le patient à une possible projection, déresponsabilisant ainsi l’acteur principal ! Je voulus partir sur le champ mais la peur d’être taxée de « passage à l’acte » me fit garder ma place en silence- je pris alors, en moi, la décision de quitter définitivement le groupe. Les autres membres, témoins de l’esclandre, reconnurent que le thérapeute était allé loin mais nous avions l’habitude de ce genre de brouille (le thérapeute ne sachant comment synchroniser ses agendas électroniques, la scène était malheureusement connue de tous, sauf de son auteur).
J’annonçai ma décision à ma psy en séance individuelle. Elle me demanda de revenir au prochain groupe pour dire mon sentiment et déclara que je ne pouvais pas quitter le groupe sans faire les 3 regroupements prévus par ses règles et dire au revoir au groupe… ce fut trop ! Il me fallut quatre séances individuelles pour lui faire entendre que je n’allais pas participer à un énième abus de pouvoir de la part de ce thérapeute et qu’à partir du moment où les bornes étaient franchies je n’étais plus tenue à aucun code de loi. Face à sa résistance et aux sempiternelles remontrances « tu as vu comment tu es intolérante à l’erreur » je pris la décision d’arrêter aussi ma thérapie individuelle.
Elle accueillit mon annonce avec stupeur me demandant pourquoi je n’acceptais pas de traverser ces épreuves avec elle et que je partais à la première difficulté ! Je lui expliquai alors que je ne décolérais pas d’avoir participé à ces abus de pouvoir de la part du thérapeute, et qu’elle y avait d’ailleurs joué le rôle de complice. Elle fut choquée et me demanda de m’expliquer. Je lui fis comprendre alors qu’elle m’avait prescrit ces séances de groupe et qu’elle n’avait eu de cesse de me renvoyer à moi quand son partenaire dépassait les bornes, me faisant croire qu’il s’agissait de moi, de mon intolérance etc.
Étant quelqu’un de facilement « coupable » je me remettais évidemment à chaque fois en question. J’ajoutai qu’en restant silencieuse face aux débordements de son partenaire elle cautionnait son comportement, et que je ne supportais plus cela. Elle essaya encore de me dire que ce n’était qu’une erreur de son camarade (qui est aussi un de ses amis) et que d’ailleurs Georges et lui avaient retrouvé une entente cordiale ! C’en était trop : parce que l’abusé faisait la paix avec son abuseur, alors tout devait bien se passer ?
A ces mots, ma thérapeute s’effondra en larmes, et j’assistai à quinze minutes de sanglots où elle me demanda pardon. Elle me dit que nous devions faire encore trois séances pour terminer le travail. Mais j’étais sonnée. Je ne comprenais pas ce qui se passait. Ou si, je comprenais que je n’avais plus rien à faire ici et qu’il me fallait partir. Elle me fixa un rendez-vous la semaine suivante que j’annulai par mail le samedi pour le mardi en lui disant combien notre dernière entrevue avait été éprouvante pour moi. Elle me répondit que comme la règle des 48 heures ouvrées n’était pas respectée je lui devais la séance de mardi !!!
Je ne répondis plus et ne paya pas cette ultime séance.
Ainsi, se termina un chemin de huit ans et demie de thérapie : par les sanglots de ma thérapeute et la demande d’un règlement.
Si beaucoup autour de moi ont salué mon sursaut et la légitimité de mon indignation, cette expérience m’a fait beaucoup réfléchir sur mon chemin.
Il serait tout à fait faux de dévaloriser ces années passées dans un cabinet de gestalt thérapeute- j’entends déjà certains rire de la piscine en or que j’ai payé à ma psy !
J’y ai principalement appris à définir ce qui dépendait de moi et ce qui n’en dépendait pas. J’ai aussi appris à exprimer mon ressenti sur les situations que je vis et apparemment, à dénoncer les abus. Ceci reste un apprentissage important. Mais j’y ai aussi expérimenté que la liberté de pensée est une chose précieuse et….aliénable au moins pour un temps.
Je ne sais pas ce qu’est un bon thérapeute, je ne sais pas ce qu’est une bonne thérapie : ce que je sais c’est qu’une enfance malheureuse se paye de la répétition de nombreux abus à l’âge adulte, quels que soient les efforts que l’on fait pour s’en sortir. Alors, la meilleure chose que je retiens de tout cela est de protéger l’enfant qui est en nous et à côté de nous, car, sinon, la route est longue.