Voici un livre attendu ; c'est la traduction d'un best-seller aux Etats-Unis, écrit par Chade-Meng Tan, un ingénieur surdoué de chez Google, qui a introduit la méditation de la pleine conscience dans la prestigieuse entreprise de la Silicon Valley. Au milieu de cette avalanche de livres sortant actuellement au sujet de cette méthode de méditation promulguée par Jon Kabat-Zinn, celui-ci a provoqué en moi, le même sentiment d'ambivalence,
dont j'ai déjà parlé sur mon blog :
"Par rapport à la situation, il y a encore dix ans en France, de la méditation considérée alors comme une activité confidentielle, voire chargée de suspicion sectaire, c’est évidemment une bonne chose qu’un aussi grand nombre de livres sortent sur le sujet et que tant de personnes aient envie de pratiquer l'ancestrale technique mise au point il y a 2500 ans par le Bouddha. Ce succès est positif, il ne peut faire que du bien, surtout par rapport au style de vie des grandes villes contaminées par le stress. La méditation de la pleine conscience devient un précieux auxiliaire de toutes les formes de relaxations et autres techniques de bien-être ; elle va bientôt se pratiquer dans tous les instituts voués au développement personnel. On pourrait même se mettre à rêver, en cette période de crise – qui n’est pas seulement économique –, d’une sorte de mutation de la conscience humaine, provoquée par tous ces nouveaux méditants, au sens où de plus en plus de personnes vont être capables de faire la différence entre la dimension limitée du mental émotionnel en proie à ses angoisses, et les horizons lumineux, holistiques et unificateurs de la pleine conscience se situant dans une dimension supérieure de l'être humain faite d’ouverture et d’amour inconditionnel.
Mais en même temps – c'est cela l'ambivalence – beaucoup de choses commencent à devenir vraiment désagréables et inquiétantes, au point qu'elles pourraient finir par desservir la méditation de la pleine conscience. Celle-ci apparaît de plus en plus comme un super produit de consommation, une opération de marketing bien orchestrée, avec des formules commerciales “à l’emporte pièce”, des promesses mirifiques de bonheur inconditionnel, afin de vendre du livre, des CD, des formations, des cours, des stages, des thérapies du développement personnel, etc. Il s'agit de faire croire à une sorte de panacée de la méditation pouvant venir à bout de tous les maux de notre société, avec bien sûr en ligne de mire pour certains, beaucoup d’argent à gagner, une nouvelle manne de profits dans le système marchand de la consommation anti-stress. Cette pleine conscience qui s'apprend seulement en huit semaines de formation, avec des exercices "minutes" pour gens pressés, serait le meilleur produit à la mode dans ce "supermarché du bien-être". Mais ne faut-il pas s'attendre par contrecoup à de grandes désillusions, des déceptions ? Comme tout produit à la mode, une fois passé l'engouement, n'est-il pas destiné à s'user rapidement ?
Dans cet empaquetage marchand réducteur, l’aspect subversif de la méditation, comme une remise en cause radicale de la manière de voir et de vivre ce monde, est complétement gommé. C'est la disparition de l’aspect révolution ou évolution de la conscience humaine, l'occultation de la possibilité d’aller au delà d'un mode de vie étriquée, centrée sur l'avidité de l'ego, pour participer d'une nouvelle forme de vie spirituelle, où amour et compassion, partage, solidarité et engagement seraient la norme.
Dans le même ordre d'idée, je citerais Gilles Lipovesky dans son dernier livre sur l’art, L’esthétisation du monde, vivre à l’âge du capitalisme artiste :
”Les esthétiques marchandes qui triomphent n’ont nullement l’ambition de nous faire toucher un absolu en rupture avec la vie quotidienne (…) Plus l’art s’infiltre dans le quotidien et l’économie, moins il est chargé de haute valeur spirituelle.„ Il suffit de remplacer l’art par la pleine conscience, et on obtient le même phénomène de récupération venant du monde marchand, où les plus hautes valeurs spirituelles d’une activité sont laminées vers le bas. La méditation de la pleine conscience devient donc un produit parmi les autres, que l’on achète pour créer une parenthèse de bien-être, afin d’échapper momentanément à un monde en folie, sans jamais rien remettre en cause de la folie de ce monde."
dont j'ai déjà parlé sur mon blog :
"Par rapport à la situation, il y a encore dix ans en France, de la méditation considérée alors comme une activité confidentielle, voire chargée de suspicion sectaire, c’est évidemment une bonne chose qu’un aussi grand nombre de livres sortent sur le sujet et que tant de personnes aient envie de pratiquer l'ancestrale technique mise au point il y a 2500 ans par le Bouddha. Ce succès est positif, il ne peut faire que du bien, surtout par rapport au style de vie des grandes villes contaminées par le stress. La méditation de la pleine conscience devient un précieux auxiliaire de toutes les formes de relaxations et autres techniques de bien-être ; elle va bientôt se pratiquer dans tous les instituts voués au développement personnel. On pourrait même se mettre à rêver, en cette période de crise – qui n’est pas seulement économique –, d’une sorte de mutation de la conscience humaine, provoquée par tous ces nouveaux méditants, au sens où de plus en plus de personnes vont être capables de faire la différence entre la dimension limitée du mental émotionnel en proie à ses angoisses, et les horizons lumineux, holistiques et unificateurs de la pleine conscience se situant dans une dimension supérieure de l'être humain faite d’ouverture et d’amour inconditionnel.
Mais en même temps – c'est cela l'ambivalence – beaucoup de choses commencent à devenir vraiment désagréables et inquiétantes, au point qu'elles pourraient finir par desservir la méditation de la pleine conscience. Celle-ci apparaît de plus en plus comme un super produit de consommation, une opération de marketing bien orchestrée, avec des formules commerciales “à l’emporte pièce”, des promesses mirifiques de bonheur inconditionnel, afin de vendre du livre, des CD, des formations, des cours, des stages, des thérapies du développement personnel, etc. Il s'agit de faire croire à une sorte de panacée de la méditation pouvant venir à bout de tous les maux de notre société, avec bien sûr en ligne de mire pour certains, beaucoup d’argent à gagner, une nouvelle manne de profits dans le système marchand de la consommation anti-stress. Cette pleine conscience qui s'apprend seulement en huit semaines de formation, avec des exercices "minutes" pour gens pressés, serait le meilleur produit à la mode dans ce "supermarché du bien-être". Mais ne faut-il pas s'attendre par contrecoup à de grandes désillusions, des déceptions ? Comme tout produit à la mode, une fois passé l'engouement, n'est-il pas destiné à s'user rapidement ?
Dans cet empaquetage marchand réducteur, l’aspect subversif de la méditation, comme une remise en cause radicale de la manière de voir et de vivre ce monde, est complétement gommé. C'est la disparition de l’aspect révolution ou évolution de la conscience humaine, l'occultation de la possibilité d’aller au delà d'un mode de vie étriquée, centrée sur l'avidité de l'ego, pour participer d'une nouvelle forme de vie spirituelle, où amour et compassion, partage, solidarité et engagement seraient la norme.
Dans le même ordre d'idée, je citerais Gilles Lipovesky dans son dernier livre sur l’art, L’esthétisation du monde, vivre à l’âge du capitalisme artiste :
”Les esthétiques marchandes qui triomphent n’ont nullement l’ambition de nous faire toucher un absolu en rupture avec la vie quotidienne (…) Plus l’art s’infiltre dans le quotidien et l’économie, moins il est chargé de haute valeur spirituelle.„ Il suffit de remplacer l’art par la pleine conscience, et on obtient le même phénomène de récupération venant du monde marchand, où les plus hautes valeurs spirituelles d’une activité sont laminées vers le bas. La méditation de la pleine conscience devient donc un produit parmi les autres, que l’on achète pour créer une parenthèse de bien-être, afin d’échapper momentanément à un monde en folie, sans jamais rien remettre en cause de la folie de ce monde."
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