Phénoménologie de la transe en médecine générale. Dr Daniel Quin

Revue Hypnose & Thérapies brèves n°50



Médecin généraliste pratiquant l’hypnose depuis quinze ans, en cabinet libéral, cette activité spécifique représente à ce jour 80 % de mes consultations.

Je suis confronté régulièrement à des de- mandes de sevrage tabagique, à des phobies de toutes sortes, des troubles anxieux, des insomnies, des pulsions alimentaires, des comportements addictifs (alcool, drogues, jeux), à de la préparation à des concours ou des épreuves sportives, des retards à l’apprentissage de la lecture ou l’écriture, des douleurs chroniques, des migraines, des problèmes dermatologiques (psoriasis, eczéma, urticaire), des troubles fonctionnels digestifs, des difficultés d’ordre gynécologique, des cystites chroniques interstitielles, à de l’accompagnement de traitements lourds, de l’énurésie, des acouphènes, des tics et des tocs, et j’en passe.

Quelle que soit la demande, ces patients attendent de nous une intervention rapide et efficace. Alors comment répondre ra- pidement, dès la première consultation, à cette diversité de demandes ?
Il s’agit d’apprendre à utiliser les ficelles hypnotiques de la phénoménologie de la transe pour transformer une transe pathologique en un état hypnotique thérapeutique.

Je ne peux que vous conseiller, au cours de vos expériences, d’observer les mani- festations de la transe que vous révèle votre patient, de par ses attitudes et son discours, et à un moment vous allez comprendre le processus qui sous-tend le problème à travers les phénomènes observés. Et plus encore, prêtez attention à ce qui vous ar- rive à vous lorsque vous entrez en transe, et vous allez alors vraiment comprendre.

La transe est une expérience intérieure. En tant que telle, le mieux pour bien la com- prendre chez autrui est de la vivre en soi. Aucune description, aussi complète et précise soit-elle, ne peut remplacer la réa- lité de l’expérience et ne peut pas non plus s’appliquer à tous les sujets. Mettez-vous en transe, en pilotage automatique, faites confiance à vos ressources inconscientes, oubliez ce que vous savez de votre savoir et de votre savoir-faire et vous allez travail- ler avec aisance et facilité pour le plus grand bien de vos patients.
Alors, qu’allons-nous vivre en faisant cette expérience de la transe hypnotique ? Les premiers chercheurs dans le do- maine de l’hypnose, à l’époque du mes- mérisme, ont montré qu’en transe certains sujets présentaient spontanément des
phénomènes comme :
- une amnésie ;
- une désorientation temporelle ;
- une modification des sensations corpo- relles comme une anesthésie plus ou moins localisée.
Plus tard, des hypnotistes ont essayé de provoquer délibérément ces phéno- mènes afin de prouver que le sujet était bien en transe, et aussi pour amener le sujet plus profondément dans la transe.
Un moyen infaillible pour savoir si votre sujet est en transe est de vérifier s’il réagit d’une certaine manière, et qu’il ma- nifeste réellement des réactions à ce que vous dites. C’est l’aptitude à répondre. Ces réactions peuvent être soit internes et sub- jectives, soit externes et observables.

On peut résumer ces phénomènes de la transe de la façon suivante :
La colonne de gauche indique la mo- dalité de l’expérience ou du comportement de la personne, celle du milieu indique son amplification, et celle de droite son atténuation ou sa suppression.
Le patient qui vient nous consulter nous fait part d’un certain nombre de plaintes. Un interrogatoire fouillé et un exa- men clinique complété par des examens complémentaires nous orientent vers un syndrome, un diagnostic de la maladie, qui nous guide vers un traitement adéquat. Le patient a alors son étiquette ! Pour nous, il s’agit avant tout de faire valser les étiquettes : « J’ai une maladie de Gilles de la Tourette ! Vous soignez ça ? Non ! Vous faites quoi qui vous fait dire que vous avez cette affection ? »

Dans l’approche qui est la nôtre, à sa- voir proposer un traitement par hypnose, nous devons écouter et observer nos pa- tients et repérer tous les éléments qui s’ap- parentent à des phénomènes de transe spontanée de laquelle ces patients n’ar- rivent pas à sortir.
Ce patient atteint de cette maladie neurologique présente un triple phénomène d’automatismes : moteur (mouvements parasites, tics), sensoriel (sensations parasites cénesthésiques) et verbal (ono-matopées). Pour nous, il manifeste des rétroactions idéo-dynamiques. On a la une sorte de transe négative. Notre travail va consister à lui induire une transe et dans cet état de conscience différent, lui faire vivre une expérience de prise de contrôle (suggestions directes et métaphoriques), d’immobilité spontanée, confortable, et une sorte d’analgésie agréable par l’expérience de la catalepsie.

En lui donnant accès à son répertoire d’apprentissages inconscients, en les mo- bilisant afin de remplacer son expérience
négative par une expérience positive vécue en transe, notre sujet peut connaître une amélioration rapide de son état, qui devra bien entendu être renforcé par des suggestions post-hypnotiques et la pratique régulière d’exercices d’autohypnose.

Comment induire une transe chez ce patient ? C’est facile ! Comme nous venonsde le voir, il y est déjà ! Ce patient est comme dans une transe commune, mais négative ; il est dissocié, inaccessible, dans une plainte chronique où l’on peut quitter la pièce sans qu’il s’en rende compte.




Rédigé le Lundi 15 Octobre 2018 modifié le Lundi 15 Octobre 2018
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Présidente de France EMDR-IMO ®, Dirige le Cabinet d'Hypnose, EMDR-IMO de Marseille. Présidente… En savoir plus sur cet auteur



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