Au comptoir, en revanche, les épanchements jaillissent "après 23 heures, quand une personne ne peut pas dormir car elle n'est pas fatiguée ou... trop fatiguée", explique Arthur, barman, qui reconnaît que son DEA en sociologie l'aide à maintenir une certaine distance.
Car les confessions peuvent être extrêmes. "Un jour, un homme s'est assis au comptoir et m'a dit, en guise de bonjour : "Mon père est mort"", poursuit-il. "L'été dernier, devant un tableau, une femme a lâché : "C'est le bleu de ma mère", et s'est effondrée en pleurs", raconte Françoise Livinec, marchande de tableaux. Au fil des années, ces confesseurs laïques mettent même au jour des noeuds personnels. "Certains ne savent jamais quelle coupe de cheveux choisir et se révèlent tout autant indécis dans leurs choix de vie. D'autres ne s'aiment pas et n'arrivent jamais à accepter leur image, quelle que soit la coupe réalisée", note Gontran Sarret, l'ancien coiffeur de l'Hôtel Royal Monceau, qui officie désormais à domicile.
"J'ai fait remarquer à un client que, dans tous les tableaux qu'il m'apportait, la chair des êtres représentés était cachée, explique l'encadreur Christian Deleruyelle. Mon interlocuteur, submergé par l'émotion, a alors soufflé : "J'ai été un enfant battu." Je me suis alors dit que j'étais allé trop loin."
Mais que font les vrais psys ? La multiplication de ces révélations intimes dans des lieux marchands "est le symptôme d'une société en mal d'humain. Dès sa naissance, le bébé a besoin de lait et de l'autre. L'homme s'adapte de façon pragmatique et trouve de nouveaux lieux d'échange", estime la psychanalyste Monique Dechaud. Auteure de Cet autre divan (Le Fil rouge, PUF, 2011), elle admet que le "tout-psy" des années 1990 et les écoles dogmatiques "ont pu faire du mal à la profession".
Témoin au quotidien de ces moments intimes dans sa galerie d'art parisienne, Françoise Livinec, ancienne psychologue en hôpital psychiatrique, vient de créer "un lieu de parole, musée poétique où tout est à vendre" (Ecoledesfilles.org) à Huelgoat (Finistère). "En pleine époque numérique, mes amis m'ont dit que j'étais folle mais, aujourd'hui, où y a-t-il encore de la place pour l'humain ?", demande-t-elle. Pour capter les émotions, les visiteurs peuvent se confier à une caméra, les vidéos sont mises en ligne sur YouTube. Le cloud comme nouveau lieu dépositaire de confessions... numériques.
Laure Belot
Car les confessions peuvent être extrêmes. "Un jour, un homme s'est assis au comptoir et m'a dit, en guise de bonjour : "Mon père est mort"", poursuit-il. "L'été dernier, devant un tableau, une femme a lâché : "C'est le bleu de ma mère", et s'est effondrée en pleurs", raconte Françoise Livinec, marchande de tableaux. Au fil des années, ces confesseurs laïques mettent même au jour des noeuds personnels. "Certains ne savent jamais quelle coupe de cheveux choisir et se révèlent tout autant indécis dans leurs choix de vie. D'autres ne s'aiment pas et n'arrivent jamais à accepter leur image, quelle que soit la coupe réalisée", note Gontran Sarret, l'ancien coiffeur de l'Hôtel Royal Monceau, qui officie désormais à domicile.
"J'ai fait remarquer à un client que, dans tous les tableaux qu'il m'apportait, la chair des êtres représentés était cachée, explique l'encadreur Christian Deleruyelle. Mon interlocuteur, submergé par l'émotion, a alors soufflé : "J'ai été un enfant battu." Je me suis alors dit que j'étais allé trop loin."
Mais que font les vrais psys ? La multiplication de ces révélations intimes dans des lieux marchands "est le symptôme d'une société en mal d'humain. Dès sa naissance, le bébé a besoin de lait et de l'autre. L'homme s'adapte de façon pragmatique et trouve de nouveaux lieux d'échange", estime la psychanalyste Monique Dechaud. Auteure de Cet autre divan (Le Fil rouge, PUF, 2011), elle admet que le "tout-psy" des années 1990 et les écoles dogmatiques "ont pu faire du mal à la profession".
Témoin au quotidien de ces moments intimes dans sa galerie d'art parisienne, Françoise Livinec, ancienne psychologue en hôpital psychiatrique, vient de créer "un lieu de parole, musée poétique où tout est à vendre" (Ecoledesfilles.org) à Huelgoat (Finistère). "En pleine époque numérique, mes amis m'ont dit que j'étais folle mais, aujourd'hui, où y a-t-il encore de la place pour l'humain ?", demande-t-elle. Pour capter les émotions, les visiteurs peuvent se confier à une caméra, les vidéos sont mises en ligne sur YouTube. Le cloud comme nouveau lieu dépositaire de confessions... numériques.
Laure Belot